MENU

La procédure disciplinaire dans la fonction publique – Maître François ROBBE (Le Patriote Beaujolais, n°857, 26 janvier 2012)

Le statut de fonctionnaire ne confère plus d’impunité. Est-ce un signe des temps ? Au cours des dernières années, un certain nombre d’agents publics, dont le comportement en service posait difficulté, ont été l’objet de procédures disciplinaires pouvant aller exceptionnellement jusqu’à la révocation.

Mais dans cette matière comme dans d’autres, les autorités administratives ne peuvent agir que dans le strict respect des textes. Elles ne peuvent adopter librement la sanction de leur choix. Le droit de la fonction publique énumère les sanctions pouvant être prononcées à l’encontre d’un agent public, et les répartit en quatre groupes :

–      premier groupe : avertissement, blâme ;

–      deuxième groupe : radiation du tableau d’avancement, abaissement d’échelon, exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de 15 jours, déplacement d’office ;

–      troisième groupe : rétrogradation, exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans ;
–  quatrième groupe : mise à la retraite d’office, révocation.

Aucune autre sanction que celles-ci ne saurait être prononcée.

Lorsqu’une procédure disciplinaire est engagée à son encontre, l’agent public bénéficie de droits et de garanties. Il doit en premier lieu être informé des poursuites dont il est l’objet et des raisons qui les motivent. L’Administration doit l’aviser de son droit à consulter son dossier, et à présenter des observations écrites ou orales, en se faisant assister s’il le souhaite de la personne de son choix.

La principale garantie accordée au fonctionnaire est la consultation du conseil de discipline, encore que cette procédure ne soit pas obligatoire pour les sanctions du premier groupe et en cas d’abandon de poste. Composé paritairement de représentants de l’Administration et de représentants syndicaux, cet organisme doit émettre un avis avant que l’autorité administrative adopte sa décision finale quant à la sanction infligée.

Dans la fonction publique territoriale, le législateur a apporté un soin particulier à l’organisation des conseils de discipline, qui son présidés par un magistrat administratif désigné par le Président du Tribunal Administratif.

De plus, lorsque les agents territoriaux contestent la sanction adoptée par l’autorité territoriale après le conseil de discipline, il leur est possible de saisir le conseil de discipline de recours. Cette instance régionale à composition paritaire est également présidée par un magistrat de l’ordre administratif.

Pour lutter contre l’arbitraire et donner un effet utile à l’avis du conseil de discipline de recours, la loi lui donne une force contraignante : l’autorité territoriale (Maire, Président de conseil général, etc…) ne peut adopter de sanction plus sévère que celle qui est préconisée par cette instance.

En tout état de cause, les décisions adoptées en matière disciplinaire peuvent être contestées devant le Tribunal Administratif, le cas échéant en référé si l’urgence le justifie. Mais en cette matière comme dans d’autres, le juge ne saurait donner suite à des requêtes infondées. Hors l’hypothèse d’un vice formel permettant de faire annuler la procédure dans son ensemble, l’agent ne devra son salut qu’à la preuve de son innocence ou de sa bonne foi.

François ROBBE
Avocat au Barreau de Villefranche-sur-Saône

Irrégularité de la garde à vue, mais condamnation valable – Monsieur le Bâtonnier Michel DESILETS (Le Patriote Beaujolais n°861, 23/02/2012)

L’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant le droit à un procès équitable et la jurisprudence récente de la Cour de cassation consacrent le droit à l’assistance d’un avocat pour toute personne mise en garde à vue dès la première heure.

A défaut la procédure est irrégulière.

Sur ces bases, deux prévenus poursuivis dans le cadre d’une même affaire avaient soulevé l’irrégularité de leurs gardes à vue et la nullité de la procédure subséquente.

Si, le procès-verbal de garde à vue mentionnait bien que l’avocat avait été avisé, son nom n’était pas précisé, ce qui ne permettait pas le contrôle de la régularité de la procédure, ni d’avoir la certitude du respect des droits des mis en garde à vue.

Les juges du fond accueillent ce moyen de nullité.

Sur appel du Parquet, la Cour infirme le jugement.

Elle écarte les procès-verbaux d’audition des mis en garde à vue, et se fondant sur d’autres éléments du dossier, acquiert la conviction de leur culpabilité et les condamne.

Ils se pourvoient en cassation espérant faire déclarer nulle toute la procédure postérieure à leur garde à vue.

Dans un arrêt du 7 février 2012, la Cour suprême rejette leur pourvoi et confirme l’arrêt de la Cour d’appel.

Elle retient le principe suivant lequel, dès lors que les juges ne se sont pas fondés sur les déclarations recueillies en garde à vue pour déclarer le prévenu coupable, celui-ci ne saurait faire grief de la non annulations des pièces de procédure établies à cette occasion.

En d’autres termes, la Cour de cassation, après s’être assurée que la Cour d’appel ne s’était pas fondée sur les déclarations recueillies en garde à vue pour déclarer les prévenus coupables, à confirmer que l’éventuelle nullité de la garde à vue était sans incidence sur le reste de la procédure.

Subtilement, la Cour d’appel s’était abstenue de motiver la condamnation sur les procès-verbaux des auditions de garde à vue, se basant sur d’autres éléments du dossier.

Cette décision peut paraitre choquante car la garde à vue s’inscrit totalement dans la procédure pénale dès lors qu’elle est mise en œuvre, et les actes judiciaires qui s’ensuivent en découlent.

Elle conduit également à s’interroger sur la nature des droits concédés comme des garanties à un procès équitable.

La tendance jurisprudentielle actuelle de réduction des moyens de nullité se confirme même au détriment des principes réaffirmés dans une déclaration de droits fondamentaux.

Michel DESILETS
Avocat au barreau de Villefranche

Régularisation des charges : après l’heure c’est plus l’heure – Monsieur le Bâtonnier Michel DESILETS (Le Patriote Beaujolais n°870, 26/04/2012)

Traditionnellement, les ventes d’animaux domestiques sont régies par le Code Rural.

En fonction des animaux, chiens, chats, bovins, ovins, etc…et de types de maladies propres à chacun d’eux, l’acheteur doit agir dans des délais extrêmement brefs, sous peine d’être irrecevable en son action et dans l’impossibilité de rechercher la responsabilité de son cocontractant.

La maladie ne se révèle cependant pas toujours dans les délais prévus par les textes.

Certains consommateurs, peu avisés, agissant tardivement se trouvaient dépourvus de recours.

Des plaideurs ont tenté de déroger à cette règle rigide, en invoquant les dispositions du Code de la Consommation.

Ils s’appuyaient sur le fait que l’acquisition d’un animal était similaire à l’acquisition d’une marchandise, et que les règles du Code de la Consommation protégeant le consommateur en matière de vente entre un profane et un professionnel, devaient s’appliquer.

La question se posait également de savoir si le fondement d’une action excluait l’autre ou si les deux pouvaient être menées de front.

La Cour de Cassation a retenu que la garantie de conformité prévue aux articles L 211-1 et suivants du Code de l            a Consommation, s’appliquait à la vente des animaux domestiques.

Cela est logique au regard d’une directive communautaire relative à certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation.

En l’espèce, un particulier ayant fait l’acquisition d’un chiot à un éleveur professionnel, avait découvert plusieurs pathologies graves chez l’animal, tardivement révélées.

Il avait sollicité sur le fondement de la garantie légale de conformité, une diminution du prix de vente et le remboursement des frais.

Le vendeur lui opposait la clause du contrat de vente, qui soumettait celle-ci aux dispositions du Code Rural et l’obligation d’agir dans le délai, au cas d’espèce, de trente jours, qui n’avait pas été respecté.

Dans un arrêt du 12 juin 2012, la Cour de Cassation retient que les dispositions du Code de la Consommation sont seuls applicables.

Entre un particulier et un professionnel, la clause d’un contrat de vente qui écarterait l’application des dispositions du Code de la Consommation, serait nulle.

Cette décision doit être saluée.

Elle milite en faveur d’une harmonisation des recours en matière de défauts de conformité ou de vices cachés.

Il faut retenir que si l’objet de la vente n’est pas conforme à ce qui est attendu par l’acheteur, celui-ci dispose de deux ans pour agir.

Les délais plus courts, en matière de vente d’animaux que prévoyait le Code Rural, ne lui sont pas opposables.

Bien évidemment, de telles règles ne sont pas applicables en matière de vente d’animaux entre deux professionnels.

Mentionnons encore que l’acheteur pouvait également solliciter le remplacement de l’animal, à défaut de demander une réduction du prix ou de conserver celui-ci.

Michel DESILETS
Avocat au Barreau de Villefranche sur Saône

Achat d’animaux domestiques à un professionnel, M. le Bâtonnier DESILETS (Le Patriote Beaujolais n°892, 27/09/2012)

Traditionnellement, les ventes d’animaux domestiques sont régies par le Code Rural.

En fonction des animaux, chiens, chats, bovins, ovins, etc…et de types de maladies propres à chacun d’eux, l’acheteur doit agir dans des délais extrêmement brefs, sous peine d’être irrecevable en son action et dans l’impossibilité de rechercher la responsabilité de son cocontractant.

La maladie ne se révèle cependant pas toujours dans les délais prévus par les textes.

Certains consommateurs, peu avisés, agissant tardivement se trouvaient dépourvus de recours.

Des plaideurs ont tenté de déroger à cette règle rigide, en invoquant les dispositions du Code de la Consommation.

Ils s’appuyaient sur le fait que l’acquisition d’un animal était similaire à l’acquisition d’une marchandise, et que les règles du Code de la Consommation protégeant le consommateur en matière de vente entre un profane et un professionnel, devaient s’appliquer.

La question se posait également de savoir si le fondement d’une action excluait l’autre ou si les deux pouvaient être menées de front.

La Cour de Cassation a retenu que la garantie de conformité prévue aux articles L 211-1 et suivants du Code de l            a Consommation, s’appliquait à la vente des animaux domestiques.

Cela est logique au regard d’une directive communautaire relative à certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation.

En l’espèce, un particulier ayant fait l’acquisition d’un chiot à un éleveur professionnel, avait découvert plusieurs pathologies graves chez l’animal, tardivement révélées.

Il avait sollicité sur le fondement de la garantie légale de conformité, une diminution du prix de vente et le remboursement des frais.

Le vendeur lui opposait la clause du contrat de vente, qui soumettait celle-ci aux dispositions du Code Rural et l’obligation d’agir dans le délai, au cas d’espèce, de trente jours, qui n’avait pas été respecté.

Dans un arrêt du 12 juin 2012, la Cour de Cassation retient que les dispositions du Code de la Consommation sont seuls applicables.

Entre un particulier et un professionnel, la clause d’un contrat de vente qui écarterait l’application des dispositions du Code de la Consommation, serait nulle.

Cette décision doit être saluée.

Elle milite en faveur d’une harmonisation des recours en matière de défauts de conformité ou de vices cachés.

Il faut retenir que si l’objet de la vente n’est pas conforme à ce qui est attendu par l’acheteur, celui-ci dispose de deux ans pour agir.

Les délais plus courts, en matière de vente d’animaux que prévoyait le Code Rural, ne lui sont pas opposables.

Bien évidemment, de telles règles ne sont pas applicables en matière de vente d’animaux entre deux professionnels.

Mentionnons encore que l’acheteur pouvait également solliciter le remplacement de l’animal, à défaut de demander une réduction du prix ou de conserver celui-ci.

Michel DESILETS
Avocat au Barreau de Villefranche sur Saône

Défaut d’entretien véhicule fonction par un salarié par Me Antonio Da Costa 2013

Le défaut d’entretien du véhicule de fonction peut-il constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement ?

A cette question inédite à notre connaissance qui lui était posée, la Chambre sociale de la Cour de Cassation vient de répondre par l’affirmative dans un arrêt rendu                        le 12 décembre 2013, non publié au bulletin.

Les faits de l’affaire sont les suivants.

Une salariée embauchée depuis 8 ans comme visiteur médical est licenciée le 23 juin 2009 par son employeur pour cause réelle et sérieuse, pour ne pas avoir suivi les préconisations d’entretien du véhicule de location de marque RENAULT qui était mis à sa disposition par l’employeur.

En effet, la salariée avait tardivement fait la révision des 30 000 kilomètres du véhicule de fonction alors qu’il affichait 36 331 kilomètres, lequel avait, moins de deux mois après, connu un problème technique (turbo moteur) ayant entraîné pour l’employeur des frais de réparation pour un montant de 9 055,51 euros, compte tenu de la non prise en charge de ce sinistre par le constructeur au motif du non-respect des préconisations d’entretien du véhicule.

Or, l’employeur avait remis à sa salariée un « guide de location automobile longue durée », ainsi que la notice d’utilisation de son véhicule de fonction, lesquels précisaient que la révision devait se faire à 30 000 kilomètres.

La salariée va contester son licenciement et obtenir gain de cause en première instance.

Saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Montpellier a jugé dans son arrêt infirmatif rendu le 21 septembre 2011, que contrairement à ce que les premiers juges avaient retenu, son licenciement était bien fondé sur une cause réelle et sérieuse et l’a déboute de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée mécontente de cette décision, forme un pourvoi en cassation et axe sa défense sur trois arguments.

Elle estimait d’abord n’avoir pas commis de faute caractérisée, en l’absence d’obligation professionnelle pesant sur elle, d’organiser elle-même les révisions de son véhicule de fonction.

Elle soutenait également que son employeur exigeait que les opérations d’entretien soient faites en dehors de la semaine de travail, de préférence le samedi. Or, le garagiste ne travaillant pas le samedi, cela l’obligeait à faire procéder aux révisions de son véhicule de fonction pendant ses jours de congés ou de RTT, ce qui nécessitait d’en faire la demande au moins un mois à l’avance.

Elle arguait enfin que le fait d’avoir procédé à la révision du véhicule, non pas à 30 000 kilomètres mais à 36 311 kilomètres, ne constituait pas un grief suffisamment sérieux pour justifier son licenciement au regard de son ancienneté et en l’absence d’antécédent disciplinaire.

Ces arguments ne vont pas convaincre la Chambre sociale de la Cour de Cassation qui, dans son arrêt rendu le 12 décembre 2013, rejette le pourvoi de la salariée considérant que son licenciement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse                (cass. soc. 12/12/2013, n°12-25298).

En effet, la Haute juridiction relève d’abord qu’il ne résulte ni de l’arrêt ni des pièces de la procédure que la salariée ait soutenu devant la Cour d’appel qu’elle n’avait pas l’obligation professionnelle d’organiser elle-même les révisions de son véhicule de fonction.

Puis, la Cour de Cassation souligne dans son second attendu principal, que « la Cour d’appel a retenu que la salariée, informée en ce qui concerne l’entretien et les révisions périodiques de son véhicule auxquelles il lui incombait de faire procéder, ne contestait pas ne pas avoir fait réviser le véhicule selon les préconisations du constructeur à 30 000 kilomètres, ce qui a eu pour conséquence un refus de prise en charge d’un sinistre ultérieur par le constructeur et causé un préjudice à l’employeur, et qu’il n’était pas établi que l’employeur exigeait que les opérations de révision soient réalisées pendant les jours de congé ou de RTT ».

La Cour Suprême estime par conséquent que c’est à bon droit que la Cour d’appel a décidé que le licenciement de la salariée procédait d’une cause réelle et sérieuse.

Moralité de l’histoire : s’il constitue un avantage en nature appréciable et non négligeable, un véhicule de fonction peut finalement s’avérer une vraie contrainte pour le salarié et lui coûter même son emploi en cas de négligence avérée de sa part dans l’entretien du véhicule de fonction mis à sa disposition pendant l’exécution de son contrat de travail, et si cela cause un préjudice à l’employeur.