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Convictions Religieuses et Interventions Chirurgicales – Monsieur le Bâtonnier Michel DESILETS (Le Patriote Beaujolais)

La Cour Administrative d’Appel de LYON a rendu courant 2008 un intéressant arrêt.

Des parents recherchaient la responsabilité d’un hôpital suite à un accouchement qui avait laissé à leur enfant des séquelles neurologiques graves.

Les faits étaient les suivants.

La mère, sur le point d’accoucher, est admise à la maternité du Centre Hospitalier.

L’expulsion de l’enfant se déroule dans des conditions difficiles et des complications surviennent.

Très rapidement, la sage-femme appelle l’interne de garde pensant devoir sans tarder recourir à une césarienne.

Le père, faisant état de convictions religieuses, relayé par la mère, s’oppose alors physiquement à l’intervention de tout médecin (obstétricien ou anesthésiste) de sexe masculin.

Le sort de l’enfant s’aggrave au point qu’une demi-heure après il est trop tard pour envisager une césarienne, l’extraction de l’enfant devant être effectuée par application de forceps.

Médicalement, la situation aurait pu être évitée par la réalisation rapide d’une césarienne prophylactique.

Constatant ultérieurement le développement anormal de l’enfant et les séquelles dont il souffrait, les parents ont recherché devant la juridiction administrative la responsabilité de l’établissement hospitalier.

Ils réclamaient la réparation de leur préjudice et sollicitaient pour leur fils, en qualité de représentants légaux, une indemnité prévisionnelle de 100 000 € ainsi qu’à titre personnel une indemnité de 10 000 €.

Leur requête est rejetée.

Ils fondaient leurs prétentions alternativement sur la responsabilité pour faute ou sans faute du Centre Hospitalier.

Dans le cadre de la responsabilité pour faute, ils leur appartenaient de prouver le fait générateur du dommage.

Or, en l’espèce, les difficultés survenues au cours de l’accouchement ont été immédiatement constatées, et l’hôpital disposait du matériel et des personnels propres à pratiquer l’opération qui s’imposait.

Seule l’opposition farouche des parents, qui n’ont permis la présence que d’une sage-femme dont la formation ne permettait pas de pratiquer l’opération, a été à l’origine du dommage.

Ils ne pouvaient non plus soutenir qu’après demande instante du personnel médical (médecins, obstétriciens et anesthésistes) ils avaient admis que ceux-ci pouvaient intervenir alors qu’il était trop tard.

Le retard leur était totalement imputable.

Plus subtilement, les parents également tentaient de soutenir que, devant leur attitude, le personnel hospitalier aurait dû faire immédiatement appel aux forces de police pour expulser le père de l’hôpital et pratiquer l’intervention qui s’imposait.

La juridiction administrative refuse de considérer qu’il s’agirait là d’une faute de nature à engager la responsabilité du Centre Hospitalier.

De même, au titre de la responsabilité sans faute, aucun moyen utile ne pouvait être soulevé.

En effet, la situation de l’hôpital, son organisation et les moyens dont il disposait étaient de nature à permettre de pratiquer le geste chirurgical qui s’imposait pour la situation qui avait été correctement diagnostiquée.

Une telle décision, malgré les conséquences, qui en résultent pour l’enfant, doit être admise.

Au-delà de la respectabilité des convictions religieuses, l’attitude des parents est bien la seule explication aux préjudices subis.

La gravité de l’attitude des parents aurait d’ailleurs permis des poursuites pour non-assistance à personne à danger, ou pour mise en danger de la personne.

Plus généralement, il appartient aux parents de prendre les décisions qui s’imposent pour secourir leurs enfants en toute circonstances et aucune conviction, aussi respectable qu’elle puisse être par ailleurs, ne justifierait qu’il y soit dérogé.

Michel DESILETS
Avocat associé au Barreau de VILLEFRANCHE SUR SAONE
SCP CEVAER – DESILETS – ROBBE