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Défaut d’entretien véhicule fonction par un salarié par Me Antonio Da Costa 2013

Le défaut d’entretien du véhicule de fonction peut-il constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement ?

A cette question inédite à notre connaissance qui lui était posée, la Chambre sociale de la Cour de Cassation vient de répondre par l’affirmative dans un arrêt rendu                        le 12 décembre 2013, non publié au bulletin.

Les faits de l’affaire sont les suivants.

Une salariée embauchée depuis 8 ans comme visiteur médical est licenciée le 23 juin 2009 par son employeur pour cause réelle et sérieuse, pour ne pas avoir suivi les préconisations d’entretien du véhicule de location de marque RENAULT qui était mis à sa disposition par l’employeur.

En effet, la salariée avait tardivement fait la révision des 30 000 kilomètres du véhicule de fonction alors qu’il affichait 36 331 kilomètres, lequel avait, moins de deux mois après, connu un problème technique (turbo moteur) ayant entraîné pour l’employeur des frais de réparation pour un montant de 9 055,51 euros, compte tenu de la non prise en charge de ce sinistre par le constructeur au motif du non-respect des préconisations d’entretien du véhicule.

Or, l’employeur avait remis à sa salariée un « guide de location automobile longue durée », ainsi que la notice d’utilisation de son véhicule de fonction, lesquels précisaient que la révision devait se faire à 30 000 kilomètres.

La salariée va contester son licenciement et obtenir gain de cause en première instance.

Saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Montpellier a jugé dans son arrêt infirmatif rendu le 21 septembre 2011, que contrairement à ce que les premiers juges avaient retenu, son licenciement était bien fondé sur une cause réelle et sérieuse et l’a déboute de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée mécontente de cette décision, forme un pourvoi en cassation et axe sa défense sur trois arguments.

Elle estimait d’abord n’avoir pas commis de faute caractérisée, en l’absence d’obligation professionnelle pesant sur elle, d’organiser elle-même les révisions de son véhicule de fonction.

Elle soutenait également que son employeur exigeait que les opérations d’entretien soient faites en dehors de la semaine de travail, de préférence le samedi. Or, le garagiste ne travaillant pas le samedi, cela l’obligeait à faire procéder aux révisions de son véhicule de fonction pendant ses jours de congés ou de RTT, ce qui nécessitait d’en faire la demande au moins un mois à l’avance.

Elle arguait enfin que le fait d’avoir procédé à la révision du véhicule, non pas à 30 000 kilomètres mais à 36 311 kilomètres, ne constituait pas un grief suffisamment sérieux pour justifier son licenciement au regard de son ancienneté et en l’absence d’antécédent disciplinaire.

Ces arguments ne vont pas convaincre la Chambre sociale de la Cour de Cassation qui, dans son arrêt rendu le 12 décembre 2013, rejette le pourvoi de la salariée considérant que son licenciement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse                (cass. soc. 12/12/2013, n°12-25298).

En effet, la Haute juridiction relève d’abord qu’il ne résulte ni de l’arrêt ni des pièces de la procédure que la salariée ait soutenu devant la Cour d’appel qu’elle n’avait pas l’obligation professionnelle d’organiser elle-même les révisions de son véhicule de fonction.

Puis, la Cour de Cassation souligne dans son second attendu principal, que « la Cour d’appel a retenu que la salariée, informée en ce qui concerne l’entretien et les révisions périodiques de son véhicule auxquelles il lui incombait de faire procéder, ne contestait pas ne pas avoir fait réviser le véhicule selon les préconisations du constructeur à 30 000 kilomètres, ce qui a eu pour conséquence un refus de prise en charge d’un sinistre ultérieur par le constructeur et causé un préjudice à l’employeur, et qu’il n’était pas établi que l’employeur exigeait que les opérations de révision soient réalisées pendant les jours de congé ou de RTT ».

La Cour Suprême estime par conséquent que c’est à bon droit que la Cour d’appel a décidé que le licenciement de la salariée procédait d’une cause réelle et sérieuse.

Moralité de l’histoire : s’il constitue un avantage en nature appréciable et non négligeable, un véhicule de fonction peut finalement s’avérer une vraie contrainte pour le salarié et lui coûter même son emploi en cas de négligence avérée de sa part dans l’entretien du véhicule de fonction mis à sa disposition pendant l’exécution de son contrat de travail, et si cela cause un préjudice à l’employeur.